Une grave question existentielle s’amène pour le
pauvre mortel que je suis. On me dira d’aller vaquer à mes occupations
quotidiennes et de délaisser ces cogitations qui troublent mon esprit. Déneiger
ma cour, faire des emplettes, m’activer sur mon vélo stationnaire, tout cela
devrait calmer mon angoisse existentielle. Solutions trop faciles et peu
convaincantes pour le Scorpion que je suis.
Et cette question? C’est celle du sens de la vie.
Puis-je escamoter cette grave question? Je ne puis pas vivre sans trouver le
sens de ma vie sur la terre. Qui suis-je? D’où viens-je? Où vais-je? Je ne suis
pas le premier à me poser ces trois grandes questions. Tous ceux et celles qui
se sont penchés sur la condition humaine ne peuvent avoir éludé ce
questionnement.
Mes trente premières années ont été teintées par la
philosophie et la théologie. Je dois vous confesser que je n’ai pas trouvé de
réponses satisfaisantes chez les philosophes et les théologiens. Avec le recul,
je constate qu’on me servait des réponses toutes faites voire souvent
simplistes. Ce n’est pas en me roucoulant le fameux « Connais-toi toi-même »
que je suis plus avancé. Et que dire du célèbre « être ou ne pas être, telle
est la question ». Impossible d’avoir une réponse plus nébuleuse. Et mon
professeur de métaphysique qui me parlait de l’être en tant qu’être. C’est d’un
ridicule consommé. Et Pascal incapable de se brancher avec son pari. Autant
avouer qu’il n’avait aucune réponse à donner.
Je sais que le chemin pour arriver à trouver une
réponse à ces questions n’est pas unique. Je ne peux pas me contenter des
réponses toutes faites issues de ma famille, du monde de l’éducation, des
religions, des philosophies, du milieu culturel dans lequel je baigne. Je suis
laissé à moi-même. Cela veut dire qu’il me faut entreprendre une démarche
intérieure, qu’il faut trouver mes propres réponses. C’est le chemin à prendre.
C’est ce qui est le plus important.
N’attendez pas de moi une belle réponse toute faite.
Chacun a à trouver un sens à sa vie. Cela implique une démarche intérieure.
Comme l’écrivait si bien Dostoïevski, ce n’est pas le but qui compte, mais le
chemin vers le but.
Justement ce chemin peut comporter des quêtes
successives. Durant mon enfance, mon
adolescence et le début de ma vie adulte, le sens de ma vie tournait autour
d’un absolu à atteindre qui s’est concrétisé par ces années jésuitiques. Je me
suis aperçu que cet absolu envisagé était une fumisterie. Je trouvai alors un
sens plus concret à donner à ma vie ce qui m’amena à fonder une famille et à me
consacrer à enseigner aux jeunes.
Maintenant que je suis sur le point d’entrer dans le
quatrième âge, je dois reconfigurer un nouveau sens à donner à ma vie. La
vieillesse et l’approche de la mort. Je vois mes amis, mes parents, des
connaissances quitter ce bas monde. Impossible de jouer à l’autruche et de me
faire accroire que je serai épargné. Il faut trouver à l’intérieur de moi-même
une façon de régénérer ce qui dégénère. Cela veut dire entrer encore plus à
l’intérieur de moi-même pour trouver un équilibre qui amènera un certain
bonheur malgré tous les drames dont je suis témoin.
Caminante no hay camino son tus huellas el camino... Antonio Machado
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