mercredi 7 novembre 2018

Homo sapiens


Je me suis réveillé, ce matin, avec l’étrange sensation que dans un passé très lointain j’étais un chimpanzé. J’étais tanné de vivre dans le haut des arbres à courir après des fruits et d’avoir à protéger mon territoire et ma progéniture. C’est ainsi qu’après des milliers d’années, je suis devenu le bipède que je suis. Évidemment mon corps s’est transformé. Je ne suis plus le Cro-Magnon de jadis vivant dans le Périgord. Je ne suis plus le chasseur-cueilleur qui bouffait totalement tout son temps pour survivre. Je suis censé être maintenant un civilisé vivant dans le Nord des Amériques parce que mes ancêtres européens ont traversé l’Atlantique et se sont imaginé avoir fait une grande découverte. Imaginez! Ils se croyaient aux Indes.

Comment en arriver dans la jeune vingtaine à devenir un Jésuite? Eh bien l`être humain pour dominer et éteindre son emprise sur d’autres congénères a inventé des mythologies comme les religions, les systèmes politiques, les idéologies de toutes sortes, etc. Pensant bien faire de ma vie, j’ai bu de cette eau sans me poser de question. C’est ainsi que j’ai fait le vœu de pauvreté alors que les jésuites étaient propriétaires de collèges, des terres, des donations de toutes sortes. J’ai fait le vœu de chasteté sans trop comprendre pourquoi je devais renoncer à l’évidente réalité d’être un être sexué. L’obéissance? Quelle arme de sujétion!

Dans ma cellule à Saint-Jérôme où je devais méditer plus d’une heure chaque matin, j’aurais dû comprendre que ce Dieu que je priais ne me donnerait jamais de réponses. Je ne suis pas le seul à supposer qu’il a été créé par des bipèdes comme moi pour combler leur solitude ou leur angoisse existentielle. J’aurais dû comprendre que les milliers d’années qui précèdent mon ère chrétienne, les humains avaient inventé d’autres manières de combler leur solitude ou leur besoin de solidarité dans quelques mythologies qui leur faisaient du bien.

Comme plusieurs j’ai cherché le bonheur à l’extérieur de moi. Aujourd’hui, j’ai la pleine conscience que le bonheur est à l’intérieur de moi. Inutile de chercher ailleurs. Dans le calme, la simplicité, la tranquillité ce bonheur est toujours accessible.

jeudi 1 novembre 2018

Il y a tant à faire

Je me suis réveillé en sursaut en cette matinée nuageuse d’automne. Me trottait dans la tête cette chanson de Daniel Bélanger : « Il y a tant à faire ». Je dois vous avouer très humblement que gérer le temps est l’épreuve de ma vie. Combien d’agendas envoyés à la poubelle au cours de ces 80 années de ma terrestre vie.

À la retraite, je croyais à tort pouvoir me débarrasser de cet intrus dans ma vie. Comble de malheur, je l’utilise plus que jamais même pour noter la plus stupide niaiserie comme placer la poubelle au chemin le mardi. Ces derniers temps, ma mémoire m’a fait vivre un malaise dont j’ai peine à me remettre. Voici. Par hasard, je croise à l’épicerie une ex-enseignante retraitée dont je n’ai pu reconnaître le visage. Pourtant au cours de ma carrière, je dois bien avoir été dans les mêmes lieux au moins pendant 15 ans.

Alors pendant que je ramassais les feuilles que le vent d’automne amène sur ma  pelouse, je me posais la question existentielle suivante : qu’est-ce que le temps? Inutile d’imaginer que nous pouvons arrêter le temps de fuir. Fuir, mais où? Inutile aussi de me rappeler que je vis dans un espace-temps. Je sais cela. Nous savons tous cela. C’est une évidence.

Pour un retraité, est-ce possible de prendre son temps? Oui, au début, on prend son café matinal sans se soucier du temps, mais vient un moment où le vertige nous atteint. Il faut agir, car il y a tant à faire. C’est une course contre la montre. Il ne faut plus perdre une minute de ce précieux temps.

Alors me revient dans la tête mon ver d’oreille à l’origine de ce propos.

Il y a tant à faire
Et ce n'est pas ridicule
C'est comme si c'était facile
S'immiscer dans la lumière
Une longue nuit... il y a tant à faire

Oui, le temps n’est plus au regret. Il faut me ressaisir

Me ressaisir en pensant au peu de temps qu’il me reste à vivre. Ah je vous entends me souffler à l’oreille que du temps j’en aurai abondamment quand je mettrai le pied dans l’éternité. Je serai probablement en dehors de nos paramètres terrestres d’espace-temps. Je serai dans une autre dimension ou peut-être tout simplement à nulle part. Alors il y aura peu à faire. Et ce n’est pas ridicule. Il me sera alors facile de m’immiscer dans la lumière ou dans des trous noirs où un long temps m’attend.

vendredi 27 octobre 2017

Combien de temps encore?

Ajouter une légende
Tout surpris encore de me réveiller en vie, je me pose la question existentielle par excellence. Combien de réveils me reste-t-il encore? Pour dire la vérité, cet homme qui a maintenant 75 ans est habité plus par les souvenirs que par les projets futurs.

Qu’est-ce que vivre? Qu’est qu’avoir vécu? Comment saisir ce que la vie pourrait encore m’apporter? Je n’ai pas le mode d’emploi pour la suite des choses qui concerne ma vie. Il y a ce vertige devant cette grande inconnue. Je ne vous cacherai pas que je suis assez et passablement hanté par la vieillesse, la maladie et la mort. Comment franchir ce vertige, voilà toute la question?

Repartir à la conquête de moi-même sans boussole et aucune carte ayant déjà tracée le chemin, tel est le destin du septuagénaire que je suis. On pense se connaître, mais ce qu’on sait de nous nous empêche probablement de nous connaître véritablement. J’ai lu quelque part que la vie, comme l’art, c’est tout ce que nous ne pouvons pas connaître, encore moins maîtriser.

Je vis dans une société atomisée et immobile où chacun est dans son coin gobant les vitamines du bonheur. Les gens autour de moi semblent incapables de gérer l’échec et les conflits. Il est impossible de traverser toute une existence sans vivre des moments de bascule. Je prends alors une grande respiration et j’essaie de me convaincre que le présent est le seul lieu du bonheur possible.

 Le fait d’exprimer cette prise de conscience la sort de l’ombre et me fait voir la lumière au bout du tunnel. Il faut que cette réflexion de l’écrivain Robert Lalonde me plonge à nouveau dans l’incertitude. « Je m’explique pas pourquoi chacun doit absolument le chercher, ce maudit bonheur, au risque de se rendre malheureux comme les pierres. » De nouveaux m’éclatent en pleine face les malheurs de notre temps, ces guerres, ces violences que subit notre monde au point d’oublier mes déchirements de conscience face à mon éventuelle finitude.

Il faudra bien que je trouve le moyen de faire naître l’espoir que ces quelques années qu’il me reste à vivre sont les plus importantes à ce moment-ci de ma vie. Force est de creuser au plus profond de moi-même et de faire un saut en hauteur qui fera luire la lumière évidente que le temps présent est de la plus suprême importance. Grégoire Delacourt résume bien tout mon ergotage précédent. « Il faut accepter la mort, que les choses ont une fin, et s’arranger pour profiter au maximum de la chance qu’on a d’être vivant, et d’avoir une vie qui fait que quand vient le temps de partir, on a fait le plein de la vie, on a été heureux, on ne regrette pas. »